15 mai 2020, nous vous présentons la réflexion de Malek Boukerchi, conférencier philo-conteur, anthropologue du lien social, et fondateur d’ARSYNOE C&T, sur le déconfinement et la nécessité de se “raconter”.
“Tu ne peux pas voyager sur un chemin sans être toi-même le chemin du lien et de l’action”
« L’erreur ne devient pas vérité parce qu’elle se propage et se multiplie ; tout comme la vérité ne devient pas erreur parce que nul ne la voit » – Gandhi
En ces temps de post-confinement délicat à situer, pratiquement plus compliqué que le confinement car l’incertitude couplée à l’irreprésentabilité du réel nous tenaille, où l’enjeu de la distanciation (non sociale mais) physique ne devra pas faire l’économie de la proximité relationnelle (prochains sujets d’actions), il s’agira alors de re-penser/panser forcément nos nouvelles manières de com-prendre ce « fameux monde d’après », car nous vivons le stade ultime du monde d’hier et le début d’une autre réalité, peut-être… ?
Car demain commence aujourd’hui… et que peut-être, rien que par la force des mots, ce que nous appelons incertitude, appelons le « étonnement »… car être étonné, c’est basculer dans la surprise joyeuse, c’est célébrer, c’est cultiver l’indispensable gourmandise du futur en ces temps de données d’un présent inquiétant…
Et donc comment basculer du confinement au raffinement, de l’internement à l’externement, de la pesanteur aux apaisantes heures demain pour nous retrouver ?
Pour ce faire, « étonne-toi de ce qui existe » comme nous l’enseignent les gnostiques des premiers siècles… car s’étonner donne la part belle à l’émerveillement, enjeu de nos raisonnances de demain ?
Car très souvent, surtout dans les jours à venir, face à l’inertie de nos modes d’actions, nous serons tous confrontés à cette question stratégique : « que puis-je faire à mon niveau pour un monde plus juste ? déclare-t-on de manière fataliste face aux turbulences et aux dérives préoccupantes du monde moderne…
Alors dans ce festival d’incertitudes généralisées, qu’est-ce qui va nous unir demain encore plus pour mieux rebondir autrement ?
Les histoires, les mots précis pour fédérer, réassurer, se recentrer, se mobiliser, se relier… Se raconter est une urgence sociale stratégique pour libérer les peurs et les espérances légitimes… Laissons les équipes, les partenaires, les collaborateurs, les gens se narrer, raconter pour exprimer sentiments et émotions légitimes avant toute quête de vitesse de vouloir rattraper le temps perdu… car le passé est passé…
A ce sujet alors, philoconteur de coeur toujours, il existe un joli conte de la tradition scandinave, dite « mésange, colombe et flocon de neige » :
Une mésange interroge une colombe :
-sais-tu ce que pèse un flocon de neige ?
– Rien d’autre que rien…
Alors la mésange raconte un souvenir :
– J’étais perché sur la branche d’un sapin lorsque la neige s’est mise à tomber, à tomber. Ce n’était pas une tempête, oh non, mais une chute progressive, lente et majestueuse. Les flocons se posaient sur ma branche : on aurait dit un rêve blanc. Je me suis amusée à les compter ! Il en est tombé 3 751 952. Au moment où le 3 751 953ème s’est posé, rien d’autre que rien, comme tu dis, la branche a cassé…
La mésange s’envole. Restée seule, la colombe se met à réfléchir. Depuis la nuit des temps, elle ne pense plus qu’à la paix, la paix dont elle est devenue le symbole… Hochant la tête, elle pense :
– Il ne manque peut-être qu’une personne pour que tout bascule et que le monde vive en paix…
Ce 3 751 952 flocon, d’un poids aussi infime que les autres, parvient à casser la branche. Ainsi de notre action, aussi infime soit-elle.
Comme le disait l’immense Vaclav Havel : « chacun d’entre nous peut changer le monde, même s’il n’a pas la moindre importance, ni le moindre pouvoir »…
Toute infime action peut suffire à casser une logique infernale, une injustice normalisée depuis des lustres, le rouage inacceptable d’un système devenu fou, à l’image de nos situations co-vidées, de ce KO-vide où l’évasion externe a été submergé par l’invasion interne numérique… Autre urgence, recréer du vrai lien, autre sujet sensible…
Alors…
Chacun/chacune de nous, par sa seule présence à un moment clé, a le pouvoir de changer le monde, ou de contribuer, à faire basculer une réalité vers une réalité plus désirable. Et c’est demain, et c’est maintenant…
En tout cas, demain encore plus dans la narration, le récit couplé à la mémoire pour éviter les amnésies qui nous guettent, aujourd’hui et demain encore mieux en toute modestie pour embarquer, fédérer et se sublimer… ce que nous ferons prochainement avec Adgency Expert dans l’une de ses fameuses expéditions apprenantes placés sous le signe de la force narrative, des « sénéfiances contées » et des analogies d’agilités ultra-marathoniennes pour faire face aux défis de nos incertitudes généralisées…
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